Lanceuse d’alerte licenciée: soutien de la CGT Thales

Licenciement d’une salariée lanceuse d’alerte !

En mai 2020 (en plein confinement), une salariée de Thales SIX-GTS Gennevilliers a été licenciée, alors même qu’elle avait obtenu le statut officiel de lanceuse d’alerte suite à son alerte éthique pour des faits de corruption auprès de l’ONU.

Mais revenons un peu à la chronologie des faits pour mieux comprendre :

  • En 2018 et 2019, cette responsable d’équipe alerte à plusieurs reprises sa hiérarchie dans un premier temps, pour dénoncer une situation anormale, d’un « ex-salarié de Thales », réserviste, qui aurait rejoint l’ONU mais continuerait non seulement d’être payé par Thales mais aussi de fournir des informations à Thales sur les appels d’offre de l’ONU. La volonté de cette salariée est bel et bien de protéger Thales et de remédier à ces faits qui peuvent être assimilés à de la corruption. Ses responsables hiérarchiques lui affirment alors qu’ils vont gérer la situation.
  • Début 2020, devant l’absence d’intervention de ses responsables hiérarchiques, et devant une situation qui perdure, cette salariée lance officiellement une alerte en prévenant le Président éthique Groupe, qui ne trouvera rien de mieux pour protéger son anonymat (comme c’est pourtant la règle élémentaire pour les lanceurs et lanceuses d’alerte…) que de prévenir ses 2 responsables hiérarchiques. Elle relancera, via le système d’alerte éthique interne, une alerte très officielle sans être pour autant prise au sérieux et protégée.
  • Début mars 2020, le comité éthique « traite » l’alerte par une conclusion très succincte, indiquant qu’il n’y a pas de faits graves, juste quelques petits « dysfonctionnements », et clôt le dossier.
  • Le 20 mars 2020, en plein confinement, la salariée reçoit une lettre de convocation pour un entretien préalable pouvant aller jusqu’au licenciement… licenciement prononcé en mai 2020 ! Evidemment, le motif officiel de licenciement n’est pas le fait d’avoir dénoncé des pratiques plus que douteuses, mais invoque « un problème de management et de relations avec certain·es salarié·es de son équipe » …

Fin 2020, le Parquet National Financier (PNF) a ouvert une procédure pour soupçons de « corruption » et de « trafic d’influence », y aurait-il dans cette affaire plus que de « simples dysfonctionnements » ?

Soutien de l’UNSA et de la CGT Thales

Depuis juillet 2020, cette salariée se bat en justice, soutenue au niveau Thales par l’UNSA, qu’elle avait contacté, et par la Maison des lanceurs d’alerte.

Le défenseur des droits, autorité administrative indépendante inscrite dans notre constitution, est lui aussi partie intervenante dans cette affaire et conclut à un licenciement abusif lié effectivement à l’alerte lancée.

Courant 2023, après déjà de longues batailles judiciaires, la salariée, via l’UNSA, contacte la CGT Thales pour lui demander de la soutenir, en vue notamment de sa prochaine procédure d’appel au tribunal de Versailles.

De suite, à la fois pour défendre cette salariée que nous estimons injustement licenciée pour avoir simplement voulu protéger notre Groupe de pratiques plus que douteuses, mais aussi dans l’intérêt de toutes et tous, pour rendre encore plus effectif la protection nécessaire des lanceurs et lanceuses d’alertes, la CGT Thales s’est portée partie intervenante dans cette procédure.

Le masque tombe ?

Dans ce dossier, la direction montre son véritable visage, bien loin du discours « bienveillant » de façade.

En effet, pour protéger certains intérêts, alors même que plusieurs faisceaux (ouverture d’une enquête du PNF, intervention du défenseur des droits…) convergent pour dire qu’il y a eu des faits graves, les directions de SIX-GTS et du Groupe ont décidé de s’en prendre à une lanceuse d’alerte, au lieu au contraire de la protéger, voire même de l’aider dans sa démarche visant à protéger notre Groupe de pratiques frauduleuses. Mais tout ceci est rendu possible du fait même du processus d’alerte éthique Groupe, qui pratique l’entre-soi directionnel.

En effet, malgré de nombreuses demandes de la part de la CGT Thales, de ses syndicats dans toutes les sociétés du Groupe, la direction a toujours refusé d’inclure des représentants du personnel dans le comité chargé d’étudier les alertes lancées. Nous comprenons évidemment aujourd’hui pourquoi !

Mais ce dossier révèle aussi le double langage de la direction sur d’autres sujets. Pour cela, il suffit d’écouter la plaidoirie de l’avocat de Thales à l’audience en appel au tribunal de Versailles le 12 septembre 2023.

Deux éléments ont particulièrement retenu notre attention, parce qu’ils peuvent s’appliquer à toutes et tous au niveau de Thales, et contredisent le discours officiel du Groupe.

Mobilité et « ancienneté » :

L’ancienneté au sein de Thales, comme indiqué dans notre accord sur les dispositions sociales à l’article 1, est définie au niveau Groupe, quelles que soient les sociétés où nous avons travaillé. Autrement dit, notre expérience est évidemment reprise à chaque fois que nous faisons une mobilité au sein de notre Groupe.

Lors de ce procès, l’avocate de la lanceuse d’alerte licenciée argumentait que depuis des années celle-ci n’avait eu que des entretiens élogieux au sein de Thales, à TGS d’où d’elle venait ainsi qu’à SIX-GTS depuis sa mobilité en 2017. Eh bien, pour les besoins de son argumentaire, l’avocat de Thales répondait que ces entretiens à TGS n’avaient pas de valeur puisqu’il s’agissait d’une autre société que SIX-GTS. Bref, il balayait d’un revers de la main non seulement le premier article de notre accord Groupe sur les dispositions sociales, mais aussi tout le discours de Thales sur les bienfaits de la mobilité, le fait de toutes et tous appartenir à un même Groupe…Et vous, comment envisagerez-vous votre prochaine mobilité après cela ?

Protection des présumé·es victimes de violences et harcèlements sexuels et morals

Au niveau de notre Groupe, des principes de précaution sont appliqués en cas de problème de harcèlement (moral ou sexuel). Ainsi, dans ces situations, s’il est nécessaire de mettre de la distance entre la victime présumée et la personne mise en cause, le principe de base Thales est de laisser en place la victime présumée et de « bouger », changer de service, d’environnement, la personne mise en cause. Ce principe de précaution permet d’éviter la double peine : être victime de harcèlement et devoir changer de poste.

L’avocate de la salariée licenciée indiquait que le motif de licenciement, le problème de comportement, voire de harcèlement présumé, était faux puisque Thales n’avait pris aucune mesure, avant le licenciement, contre cette salariée licenciée pour stopper ces soi-disant problèmes. En réponse, et pour les besoins de sa plaidoirie, l’avocat de Thales a totalement mis en pièce le principe de précaution évoqué plus haut en indiquant que Thales avait justement agi… en écartant la salariée présumée harcelée par la lanceuse d’alerte licenciée…Et vous, comment réagiriez-vous demain si vous êtes vous-même victime de harcèlement ?

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Une réaction

  1. Qu’en pensent les actionnaires du groupe (paragraphe 5.6.1.8 du rapport financier) auxquels on promet la présence en interne d’un système de conformité sécurisé et accessible à tous ?

    Qu’en est-il de la culture de confiance de THALES basée « sur l’éthique, l’intégrité et la conformité » devant encourager les collaborateurs à signaler les conduites ou situations contraires aux règles ?

    THALES = ENRON ???

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