Salaires, temps de travail et convention collective : rien que ça…

Oui ces 3 thèmes font actuellement l’actualité au niveau de Thales et de la métallurgie, et sont structurant pour les droits de toutes et tous.

La politique salariale 2022

Après une politique salariale 2021 vécu pour beaucoup comme une véritable provocation, ses négociations pour 2022 sont actuellement bloquées, du fait d’une position dogmatique de la direction. Celle-ci reste totalement sourde face à l’expression fort du mécontentement des salariés, qui se mobilisent tous les jeudis à l’appel de l’intersyndicale. Le pire est que la direction reste muette face aux légitimes revendications portées en matière salariale, à savoir :

  • Un budget de politique salariale nettement au-dessus des 4%. En effet l’inflation sur 2021 est de 2,8%, L’estimation pour la période de juin 2021 à juin 2022 est de l’ordre de 3,4%. Vous le voyez, le budget de 3,5% proposé par la direction couvre à peine l’inflation. En réalité il n’y aurait aucune augmentation de salaire pour rémunérer l’expérience acquise, l’augmentation de nos qualifications alors que tous les salariés se sont adaptés à la situation actuelle, aux conditions de travail dégradées, aux nouvelles organisations de travail. Et quid du rattrapage de la politique salariale désastreuses, injuste et inéquitable de 2021 ?
  • Une rétroactivité des augmentations de salaire au 1er janvier 2022. S’il a suffi d’un claquement de doigt en 2021 pour décaler la politique salariale à juillet, il doit suffire d’un même claquement de doigt en 2022 pour revenir immédiatement à janvier.

Depuis le début des discussions sur la note de cadrage Groupe, où nous avons tout de même réussi à faire bouger quelques lignes, la CGT impulse, à tous les niveaux, les intersyndicales pour proposer à toutes et tous des actions, car hélas la direction préfère toujours privilégier les actionnaires et les marchés financiers au détriment des salariés. Il nous faut donc encore amplifier notre mobilisation, et vous trouverez toujours la CGT à vos côtés.

Le temps de travail

Pendant ce temps-là la direction continue de vouloir négocier son accord Groupe sur le temps de travail, alors que la priorité pour nous reste de répondre à la question de la politique salariale 2022.

Les propositions CGT Thales

Nous avions jusqu’ici porté de très nombreuses propositions sur cette question du temps de travail, que ce soit sur l’évaluation et le contrôle de la charge de travail, tant collectif qu’individuel, un réel droit à la déconnexion effectif, l’organisation du temps de travail avec les souplesses demandées par les salariés, le contrôle du temps de travail sans que celui-ci ne tourne au flicage, l’emploi, …

Evidemment nous proposons aussi une réduction de celui-ci, sans perte de salaire, qui est partout dans le monde un sujet d’actualité. L’Espagne, et même la très libérale Grande-Bretagne lancent une grande expérimentation de réduction du temps de travail à 32H. En Allemagne, le syndicat IG Métal revendique lui aussi une réduction du temps de travail. Des entreprises dans le monde, que ce soit au Canada, en Nouvelle-Zélande ou même au japon, ont franchi le pas de réduire leur temps de travail. En France aussi certaines entreprises se sont lancés et sont passées aux 32H sans pertes de salaires. Et le moins que l’on puisse dire c’est que toutes en vantent les bénéfices, tant évidemment sur le plan de la qualité de vie des salariés mais aussi sur le plan économique pour l’entreprise et la collectivité.

http://www.slate.fr/story/223224/entreprises-britanniques-test-semaine-4-jours-norme-loi-travail

https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/reduction-du-temps-de-travail-les-islandais-travaillent-moins-et-sont-plusheureux_4825905.html

https://www.elle.fr/Societe/News/L-Espagne-va-tester-la-semaine-de-4-jours-pendant-trois-ans-3966753

https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-choix-franceinfo/des-salaries-moins-fatigues-pas-d-arrets-maladie-des-gains-economiques-et-personnels-cette-entreprise-a-teste-la-semaine-de-quatrejours_4931077.html

https://www.europe1.fr/societe/et-si-la-semaine-de-quatre-jours-etait-aussi-benefique-pour-les-salaries-que-pour-leur-patron-4091754

https://www.channelnews.fr/groupe-tenor-adopte-la-semaine-de-quatre-jours-dans-un-contexte-de-forte-acceleration-de-son-activite-109903

La volonté de la direction du Groupe

Alors pourquoi Thales veut aller à contre-sens de l’histoire ? En effet, dans ces négociations l’objectif de la direction semble bel et bien d’envoyer un message (à qui ? encore aux marchés financiers ?) d’augmentation du temps de travail dans le Groupe. Pour l’instant, le projet d’accord prévoit que les nouveaux embauchés, ingénieurs et cadres, se verront proposé uniquement un forfait-jours à 215 jours par an…et que tous les salariés actuellement en place se verront proposé de rejoindre ce nouveau forfait. 

Pour la CGT Thales il ne peut être question d’augmenter la référence effective du temps de travail dans le Groupe, à la fois pour la santé et la qualité de vie au travail, l’équilibre vie personnelle/vie professionnelle, mais aussi par responsabilité sociétale. En effet tout augmentation du temps de travail aura un effet négative sur l’emploi, alors qu’à l’inverse sa diminution créera de l’emploi, comme cela a été le cas avec les 35h, contrairement aux idées reçues propagées par certains (cf. https://www.insee.fr/fr/statistiques/1376464?sommaire=1376476 )

De plus il ne peut-être question pour la CGT Thales d’opposer ou sacrifier les jeunes, les futurs embauchés, pour faire passer aux salariés actuellement en poste la pilule d’une régression sociale. C’est ce même procédé qui a été utilisé d’ailleurs lors des négociations sur la nouvelle convention collective de la métallurgie, signé hélas par la CFDT, la CFE-CGC et FO.

La convention collective de la métallurgie

Après plus de 6 ans de négociations, pendant lesquelles seule la CGT vous a tenu informé régulièrement, la CFDT, la CFE-CGC et FO ont signé avec l’UIMM, le patronat de la métallurgie, une nouvelle convention collective unique pour tous les salariés.

Mais pourquoi ces organisations syndicales ont signé ce texte ? pourquoi ne vous-on-elles pas informé tout au long de la négociation ? Pourquoi d’ailleurs vous ne trouvez actuellement ce texte que sur le site de la FTM CGT, ici : https://ftm-cgt.fr/dispositif-conventionnel-et-accords/

Une simplification ?

Tout d’abord vous entendrez que ce texte est une simplification, oui c’est vrai incontestablement…Mais simplifier ne veut pas dire améliorer, bien au contraire souvent… on passe effectivement de 78 accords à un seul, ou encore de 7 000 pages (si on compile toutes les conventions collectives dans tous les territoires, ce qui pour un établissement donné, un salarié donné n’a pas de sens) à seulement 230.

Les points positifs ?

Mais sur le contenu alors ? et bien là, pour la CGT, après avoir consulté les salariés qui ont répondu à plus de 95% leur opposition à ce texte, le constat est très largement négatif. Certes oui il y a quelques avancés, et notamment en terme de protection sociale « gros risques » (décès, invalidité) notamment pour les entreprises qui n’en avait pas encore.

Un autre point positif : la paie des salariés en arrêt maladie serait maintenue à 100% un peu plus longtemps. Sans doute, mais le patronat acquiert aussi la possibilité de licencier un salarié en arrêt maladie si son absence perturbe le fonctionnement de l’entreprise (Article 91.2, page 100). Et devinez qui décide si l’absence du salarié perturbe le fonctionnement de l’entreprise ? La direction, bien évidemment. 

Les classifications ?

Un des changement majeur et fondamental de cette nouvelle convention collective concerne donc les classifications. Désormais ce n’est plus vous qui, selon votre qualification, votre expérience et votre diplôme, êtes classé, mais uniquement le poste de travail que la direction vous assignera. Et tous vos droits, dont le salaire minimum, dépendra de ce choix fait uniquement par la direction…

Et ce qui compte, ce ne sont pas vos compétences, mais bien celles qui sont nécessaires au poste que la direction daignera vous confier. Vous pouvez être le plus grand expert de votre discipline, ou avoir des capacités de communication hors-norme, si votre poste n’en a pas besoin, ça ne compte pas. Et c’est bien la direction seule qui décide. Son seul devoir est de vous informer de sa décision, mais personne ne peut négocier ou contester l’évaluation de son poste (article 63.2.1, page 66) … Et votre qualification évoluera désormais, selon la philosophie de cet accord, non plus suivant l’expérience que vous allez acquérir, mais suivant les postes que vous pourrez occuper…

Mais vous allez dire, j’ai tout de même un diplôme qui doit être reconnu ? Et bien en réalité non. L’article 61.2 (page 63) précise « Les signataires rappellent que la détention d’un diplôme ne génère pas de droit à l’attribution du degré d’exigence correspondant lors de l’évaluation du critère connaissances ». C’est pourtant clair…

Et si vous en doutiez, l’article 62.5 (page 66) en remet une couche «Le niveau de connaissances, acquis par la formation initiale, par la formation continue ou par l’expérience, est à la base de toutes les compétences requises pour un emploi. Toutefois, la détention d’un niveau de diplôme ou de certification professionnelle ne crée pas de droit à un classement minimal. ».

Mais dans sa grande générosité l’UIMM a lâché sur 2 diplômes, le BTS et le diplôme d’ingénieur… car ce même article 62.5 précise « En vue de favoriser cette cohérence, et par exception à l’alinéa premier, lorsque l’offre d’emploi mentionne l’exigence d’un diplôme ou d’une certification professionnelle de niveau 7 du cadre national des certifications professionnelles, l’emploi, tel qu’il est réellement tenu, relève au moins de la classe d’emplois F11. De même, lorsque l’offre d’emploi mentionne l’exigence d’un diplôme ou d’une certification professionnelle de niveau 5 du cadre national des certifications professionnelles, l’emploi, tel qu’il est réellement tenu, relève au moins de la classe d’emplois C6. ». Et bien en fait non, pour être reconnu il faut que la direction choisisse elle-même de le mentionner dans l’offre d’emploi… elle n’a pas d’obligation, même pour ces deux diplômes.

Mais que se passe-t-il en cas de changement de postes ? Il faut regarder l’article 63.2.3 (page 68) pour comprendre : « Les signataires de la présente convention rappellent que toute modification d’un élément essentiel du contrat de travail (dite aussi « modification du contrat », par opposition à « changement des conditions de travail »), décidée par l’employeur, est soumise à l’accord préalable du salarié. L’accord du salarié est exprès, sauf lorsque la loi prévoit qu’il est exprimé tacitement. Toute modification de l’emploi décidée par l’employeur, lorsqu’elle entraîne une modification de classement, constitue nécessairement la modification d’un élément essentiel du contrat de travail. Dans le délai d’un mois à partir de cette modification, le salarié peut adresser à son employeur une demande d’explications concernant le classement retenu. En réponse, dans le délai d’un mois suivant cette demande, l’employeur indique au salarié, par tout moyen, le degré retenu pour chaque critère classant du référentiel d’analyse visé à l’Article 60 de la présente convention. Cette réponse peut notamment avoir lieu à l’occasion d’un entretien entre le salarié et l’employeur ou son représentant ».

Donc pour baisser le salaire ou la qualification, cela nécessite votre accord. Ce qui n’empêche nullement l’UIMM de maintenir et même réaffirmer la finalité de cette nouvelle convention collective (voir par exemple art 8. Prévention du licenciement économique avec un périmètre très flou et permissif des motifs économiques) : la classification c’est une qualification attachée au poste de travail et donc un salaire, et toute évolution de poste en moins ou en plus dans sa vie professionnelle doit se conformer à ces deux principes.

Les ordonnances Macron intervenues en 2017 permettent de licencier sans nécessairement avoir une cause réelle ou sérieuse et sans même respecter la procédure de licenciement.

La nouvelle convention collective, adossée aux ordonnances Macron, aura tôt fait de faire comprendre au salarié qui évolue sur un poste moins bien classé, quel est son intérêt s’il souhaite conserver son emploi !

Le salaire minimum ?

Certains avancent une augmentation de la rémunération minimale pour une majorité des salariés, mais en réalité, au vu du changement radical opéré, il est impossible de savoir où se trouve l’équivalence entre nos classifications actuelles et les classifications futures… Donc rien n’est moins sûr.

La grille des minimums de salaire (annexe 6, page 189), ça c’est sûr, elle est plus simple. Ne criez pas trop vite (mais vous pouvez crier quand même), elle est à majorer de 15% voire 30% si vous êtes en forfait horaire ou en forfait jours. Mais attention, il s’agit là du barème pour … 2024… on vous reparle du pouvoir d’achat et de l’inflation ?

De plus, en faisant le calcul, on y perd vite… Si vous êtes au forfait-jours en position 2, indice 114, votre minimum est de 43 380€. Si vous passez F11, votre minimum sera en 2024 de 42 250€.

Petit bonus pour les nouveaux ingénieurs et cadres : les signataires de la convention (on ne vous redit pas qui) estiment qu’il faut 6 ans d’ancienneté dans l’entreprise pour avoir le droit au salaire minimum du groupe F (et seulement celui-ci). Donc, vos minimums seront réduits de quasi 20% à l’embauche, puis augmentés petit à petit au cours de votre prise d’ancienneté dans la même entreprise. Donc, si vous êtes jeunes, vous travaillerez pour moins cher !

La prime d’ancienneté ?

Quant à la prime d’ancienneté, le nouveau calcul est détaillé en annexe 7 (page 191). Selon toute nos simulations, on y perd aussi. Par exemple, la prime d’ancienneté d’un ouvrier coefficient 255 avec 10 ans d’ancienneté est aujourd’hui de 142,98€ (avenant du 15/01/2021 de la convention du Maine et Loire). Avec le nouveau calcul et la valeur du point actuelle (5,34€), si on considère que le même ouvrier sera de classe C5 (ce qui dépend entièrement de l’évaluation de son poste…), sa prime sera de 117,48€. Bien-sûr, le montant de sa prime sera compensé pour correspondre à son niveau de début 2023 jusqu’à ce que le nouveau calcul l’atteigne… Mais ça veut dire qu’il faudra attendre des années pour qu’elle augmente ! Et cela signifie encore une fois que les nouveaux embauchés toucheront une prime au rabais. Encore une fois les signataires ont accepté de sacrifier les jeunes.

Imprimer cet article Télécharger cet article

Une réaction

  1. Pas merci pour vos blocages et bouchons monstres pour arriver ce matin sur la zone d’emplois de Vélizy.
    Manifester : oui.
    Bloquer les autres : NON.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *