Il en va des rapports de la Cour des comptes comme des préparations d’artillerie avant l’assaut.
Ils servent souvent à préparer l’opinion par des chiffres –c’est toujours incontestable n’est-ce pas les chiffres ?- afin de lui administrer ensuite une bonne purge afin que le malade meure guéri.
La semaine passée il s’est donc trouvé au détour d’un rapport traitant de la dette cumulée de l’assurance chômage (18,4 milliards d’euros en 2013), un passage pour stigmatiser l’indemnisation des cadres.
Jugée trop élevée, trop généreuse et sans équivalent en Europe.
Et l’on découvre avec un étonnement candide que, non tous les chômeurs ne touchent pas la même chose. Que le plafond d’indemnisation était en 2012 de 6 121,29 euros… tandis que l’allocation mensuelle moyenne était de 1 007 euros. Haro sur les cols blancs ! Sus aux privilèges !
On retourne la lorgnette pour regarder par le petit trou et l’on fait des gorges chaudes afin de justifier une réforme dont tout le monde parle depuis 20 ans.
Ce coup-là, disons-le tout net, c’est de la mauvaise com, car une fois encore, on désigne un vilain coupable, on dresse une catégorie contre une autre.
Mais c’est oublier un peu vite que si une poignée de très hauts cadres ont touché cette somme, l’encadrement (tous niveaux de salaires) contribue pour un tiers aux ressources de l’assurance chômage et n’en perçoit que 10 %.
D’autre part, on oublie que l’Unedic fonctionne sur un mode assurantiel, c’est-à-dire que l’on est sensés percevoir à due proportion de ce que l’on a cotisé pour, « quand la bise sera venue » être indemnisé d’un préjudice.
Et puis, il n’est pas si sûr que de baisser le plafond d’indemnisation n’ait pas des effets négatifs et mécaniques sur les recettes du régime.
Car pour le modifier, il faut aussi modifier proportionnellement celui des cotisations.
Or, parmi les chômeurs indemnisés, ceux qui avaient un salaire élevé sont très nettement moins nombreux que ceux aux rémunérations faibles.
Ce rapport de la Cour des comptes propose, et c’est là le plus important, de revoir à la baisse l’indemnisation des chômeurs.
Le problème est, pour la CGT, qu’il semble recueillir « une oreille attentive du côté du gouvernement ».
Cette focalisation sur une poignée de cadres à hauts salaires ne doit pas faire oublier que moins de 42 % des demandeurs d’emploi sont indemnisés par l’assurance chômage et que le niveau moyen de l’indemnisation atteint péniblement mille euros.