La direction de Thales a décidé de vendre nos activités « Systèmes de transport terrestre » (“Ground Transportation Systems” ou “GTS”) à Hitachi Rail pour un montant d’environ 1,66 Mds. Ce choix aura de lourdes conséquences sociales pour les 9000 salariés de la GBU mais aussi industrielles pour notre Groupe.
Un choix financier ?
La décision de vendre GTS est une conséquence directe du mode de gestion de notre Groupe par ses dirigeants, basée sur la fixation d’un objectif financier à 12% d’EBIT (résultat opérationnel). Ce constat, que nous faisons depuis longtemps, est clairement confirmé par les propos du PDG de Thales dans le communiqué de presse concernant cette vente : « Les activités que détient Thales sur chacun de ces marchés sont des acteurs de premier plan, spécialisés dans les systèmes intelligents et les solutions numériques, et capables de générer durablement des marges d’EBIT à deux chiffres. Ce mouvement permet ainsi au Groupe de viser désormais une marge d’EBIT de 12% sur le moyen terme. »
Or les activités de GTS sont loin d’atteindre ces marges et résultats, avec un EBIT fluctuant autour de 6%. De plus si l’on regarde les principaux concurrents dans ce domaine, les rendements maximums se situent autour de 8 à 9%, en dessous des standards fixés par les financiers pour Thales.
La vente de GTS permettrait ainsi de pouvoir tenir la promesse faite aux investisseurs, aux marchés financiers, d’atteindre rapidement un EBIT à 12%, en se séparant des activités qui ne sont pas jugées assez rentables selon les critères de nos dirigeants. Cela permettrait aussi dans le même temps de renforcer notre trésorerie.
Un choix industriel ?
Il y a tout juste quelques jours la direction de notre Groupe communiquait sur l’intranet pour vanter les mérites des synergies entre DIS, SIX et GTS, synergies qui sont effectivement nombreuses et permettent souvent de proposer des offres complètes et innovantes. Mais bizarrement cette communication a disparu de notre intranet juste après l’annonce du projet de vente de GTS… Ces pertes de synergies ne seraient-elles pas synonyme de perte de compétitivité, y compris pour les activités de DIS et SIX ?
Plus globalement se posent aussi les questions d’évolutions de nos activités et de diversifications. Pour rappel, si Thales s’en sort très bien aujourd’hui, malgré la pandémie, c’est justement parce que nos activités sont diversifiées. Là encore il ne s’agit pas uniquement de l’analyse de la CGT, mais des propos mêmes du PDG de Thales lors de l’annonce des résultats de 2020. En effet l’avantage stratégique est de pouvoir compter sur des activités variées, et lorsqu’une activité va un peu moins bien, d’autres viennent compenser. C’est par exemple le cas actuellement avec les activités aéronautiques, qui connaissent un creux temporaire du fait de la pandémie, mais qui ont porté notre Groupe pendant des années…Alors doit-on vraiment se recentrer sur 3 grands domaines seulement ?
Pourquoi Hitachi Rail ?
En plus des questions financières et industrielles se pose aussi la question du choix du repreneur des activités GTS. En effet 2 candidats étaient en lice, Hitachi Rail et l’espagnol CAF. Au vu de la période, durant laquelle les questions de souveraineté industrielles se reposent, pourquoi ne pas avoir privilégié un repreneur Européen ?
Quid de la préparation de l’avenir ?
Se séparer de nos activités Transport, c’est aussi se séparer d’activités pouvant préparer l’avenir, comme le rappelle l’accord Groupe “pour soutenir l’emploi, l’activité et préparer l’avenir” signé par le PDG de Thales lui-même. Le titre III de cet accord, porté par le projet CGT lors des négociations, évoque notamment :
” Article 2 – Renforcer le ferroviaire par l’innovation
Thales est convaincu du rôle que doit jouer le ferroviaire dans la transition écologique des mobilités. Dès le printemps, Thales a initié des discussions avec la filière ferroviaire et le Gouvernement pour identifier des axes de soutien au ferroviaire par l’innovation. Ces projets sont encore en cours d’identification, et pourraient se traduire par une hausse de la SFRD (R&D autofinancée) de Thales en France dans le domaine ferroviaire. Les axes d’étude portent notamment sur la digitalisation (autonomie, digitalisation des procédés et du contrôle du réseau) et le développement de nouvelles technologies pour renforcer la compétitivité du réseau secondaire (signalisation frugale).”
6 mois après la signature de cet accord, Thales souhaite vendre la GBU GTS. La stratégie de notre Groupe aurait changé en si peu de temps ? N’est-ce pas là encore une contradiction de la direction de notre Groupe ?
Enfin, comme indiqué dans le texte de notre accord Groupe, ces activités permettraient aussi de participer à l’effort en matière écologique, par le développement nécessaire des transports en commun…surtout lorsqu’on sait que plus de 80% environ de l’empreinte écologique de Thales provient justement de nos produit, systèmes et de leur utilisation, et non pas des salariés, du mode de déplacement ou de nos opérations internes.
Quel positionnement CGT Thales ?
Nos priorités sont et seront toujours de préserver l’emploi, de garantir les conditions de travail, d’agir en faveur du progrès mais aussi de développer notre industrie pour que celle-ci réponde réellement aux besoins des citoyens et préserve notre planète.
Ces 4 critères nous guideront face à ce projet de vente des activités GTS, à la fois pour préserver les intérêts des salariés et développer nos activités afin que celles-ci soient responsables socialement et écologiquement. La CGT, avec les salariés, mettra tout en œuvre pour cela.
Ces objectifs devraient donc guider les choix stratégiques de notre Groupe, et non pas les intérêts financiers qui ne profitent qu’à une minorité.
Voilà pourquoi la CGT pense que les salariés et leurs organisations syndicales doivent intervenir dans la stratégie de l’entreprise… et pourquoi nous intervenons sur les choix stratégiques de notre Groupe et portons de nombreux projets industriels, comme celui que nous menons depuis plus de 10 ans de reconstruire une filière des équipements médicaux en France, qui pourrait passer par la création d’une GBU « Médical » à Thales… La pandémie a mis en avant la nécessité de structurer cette filière.