Le gouvernement et sa majorité distillent les annonces sur le contenu de la réforme des retraites dont le texte sera envoyé aux organisations syndicales le 15 juin au soir. Des organisations qui, pour le coup, ne pourront pas être qualifiées de « partenaires sociaux » tant le contenu qui se dessine emprunte aux revendications patronales et tant le dialogue social aura été foulé aux pieds durant tout le processus d’élaboration du texte. Vendredi, c’était au tour du président du groupe UMP au Sénat, Gérard Longuet, de se prononcer officiellement pour un report de l’âge légal de départ à la retraite à 63 ans, avec une mise en oeuvre progressive d’un trimestre par an. La patronne des patrons ne sera donc pas tout à fait aux anges, mais pas de quoi bouder quand même… Elle qui proposait une mise en oeuvre à raison d’un semestre par an. La CGT tout comme une large partie de l’opinion est attachée à cette norme sociale de 60 ans pour un départ à la retraite, car tout le monde sait que de 60 à 65 ans ce sont les meilleures années de retraite, mais que ce seraient aussi les pires années au boulot.
C’est ainsi pour les millions de salariés employés à des tâches pénibles, dangereuses, mais c’est devenu, avec l’intensification du travail, le stress, le déclassement et l’absence de perspectives, le lot commun de beaucoup d’autres catégorise de salariés. Que d’études et de rapports ont été publiés sur ce désenchantement pour le travail !
On voudrait nous faire croire que nos catégories plus qualifiées et moins exposées à la pénibilité seraient plus enclines à prolonger leur vie professionnelle. Mais quelle est, et quelle sera la part de choix dans cette prolongation audelà de 60 ans ?
C’est bien contraint et forcé que les générations futures de diplômés devront prolonger la partie pour prétendre à une carrière complète. Plus que de travailler longtemps, les catégories les plus qualifiées revendiquent un travail qui fait sens, des responsabilités et des compétences reconnues. Il faut arrêter avec ces espèces d’images d’Épinal de cols blancs « work addicts », drogués du boulot.
On a vu dans bien des baromètres et études que les salariés en responsabilités revendiquent une frontière plus nette entre vie privée et vie professionnelle. Dès lors pourquoi voudraient-ils absolument sacrifier ces années de retraite où leur vie peut justement prendre un tout autre sens ? Et puis les ingénieurs cadres et techniciens, les professions intermédiaires sont lucides : pourquoi travailler plus longtemps alors que leurs enfants, même diplômés, peinent à se faire une place au travail et à gagner leur autonomie.
Nous avons toutes les raisons de nous accrocher à cette liberté de partir à 60 ans.
Le 24 juin, avec nos collègues, nous pouvons le dire plus haut et plus fort. Et pourquoi pas, d’ici là, aller au devant d’eux pour en débattre avec la carte pétition de la CGT dont les premiers 214 188 exemplaires ont été déposés chez Éric Woerth le 9 juin ?