La Fédération de la Métallurgie CGT se félicite d’un accord de dimension européenne portant sur l’anticipation et le développement professionnel des salariés du Groupe Thalès. L’accord définissant, en son article J, la prééminence des accords nationaux n’apporte pas en tant que tel, des droits nouveaux aux salariés du Groupe, et français en particulier, à l’exception notoire d’un droit effectif à la formation pour chaque salarié tous les trois ans minimum. L’écueil d’une ratification a posteriori d’une politique de Ressources Humaines, dénommée « People First », non négocié, est évité.
L’accord relève essentiellement d’une déclaration de principes de gestion anticipée et à vocation participative de l’évolution professionnelle collective et individuelle des salariés, ce qui est une démarche positive de responsabilisation des salariés et de leurs organisations et instances représentatives, à la condition que soit associée les moyens de la mettre en oeuvre.
Cela impliquerait notamment d’avoir accès à des moyens d’expertise indépendante des Directions et d’analyse économique et industrielle, nécessaire à la prospective et à la confrontation des enjeux en matière de devenir des métiers. L’accord ne fait qu’en effleurer la perspective. L’expérience acquise au travers de la mise en oeuvre de l’accord d’anticipation France nous renforce dans l’extrême vigilance à porter à ses aspects.De même, l’accord s’inscrit dans une perspective où le Groupe vivrait en régime stable (p 4), alors qu’il est régulièrement secoué par des crises sociales consécutives aux choix de restructuration sur lesquels les salariés et leurs organisations ont peu de prise, entraînant cessions/acquisitions d’activités ou fusion partielle d’entreprise, sans oublier les reconfiguration organisationnelle et juridique.
La référence de l’adhésion des parties à l’accord à la promotion d’un emploi de qualité au travers de la stratégie de Lisbonne (§ A1) mériterait que chacune des parties expriment de quel point vue, elles s’inscrivent dans cette démarche. Notamment, le point de vue de la CES (Confédération Européenne des Syndicats) aurait permis une meilleure perception de l’accord par nos syndicats des sites Thales. Ne serait-ce qu’en soulignant à l’instar de la communication du site de la CES, que si « la CES a toujours soutenu cette stratégie, elle considère cependant qu’elle n’atteint pas ses objectifs, en grande partie parce que les aspects sociaux et environnementaux sont sacrifiés aux demandes économiques à court terme. »
A titre plus factuel, la négociation sur l’harmonisation des conditions de déplacements dans chaque pays mériterait d’être aussi ouverte en envisageant une harmonisation au niveau du périmètre de l’Europe, notamment au travers du critère de parité de pouvoir d’achat.
La sensibilisation au dialogue social devrait s’entendre avec la participation (H3 p39) effective des organisations syndicales représentatives dans le périmètre concerné et avec toute la latitude et l’indépendance nécessaire quant à leur expression, afin de préciser et de clarifier la collaboration évoquée. D’autre part, il faut être attentif à l’impact sur les syndicats de sites français, quant à un accord dont la référence légal soit le texte en langue anglaise dans un groupe où le siège du Groupe est situé en France et surtout où 34 000 sur 54 000 salariés sont en France. De fortes réticences à la prise en compte positive de l’accord vont en découler.
Autre enseignement à tirer de cette négociation de niveau européen du fait de son application quasi mécanique au niveau national, il faut à notre sens être particulièrement vigilant quant à la méthodologie de négociation permettant un aller/retour soigné afin de pouvoir impliquer nos syndicats au niveau adéquat, et d’assurer une construction démocratique de nos accords.
En effet, l’incapacité pratique à faire participer les syndicats de base, notamment dans la dernière phase (texte mis à l’approbation de nos organisations au cours du mois de mai), une nécessité incontournable dans notre fonctionnement, handicape l’appropriation de l’esprit et contenus de l’accord, et peut générer des pratiques de rejet sur le terrain. S’agissant d’un accord de politique générale, hormis l’emprunte idéologique que cela imprime, à laquelle il faut veiller (cf. stratégie de Lisbonne), le danger peut être considéré comme mineur et l’avantage de consolider l’utilité de la FEM comme outil effectif de construction social, supérieur. Mais lorsqu’il s’agira de négocier des éléments impactant directement le quotidien des salariés dans les éléments essentiels du contrat de travail (salaire et rémunération variable, conditions de travail, temps de travail, etc), nous ne pourrons pas faire l’économie d’une démarche rigoureuse et favorisant l’expression démocratique, donc les temps nécessaires à cette démarche, sauf à rencontrer des oppositions fortes et à nous contraindre de nous positionner en contre.
En conclusion, nous faisons le pari de nous prononcer positivement sur l’accord mis à la signature.
le texte de l’accord sera mis en ligne dès que nous aurons récupérer la version officielle signée.